Une méthode globale pour les parents bons skieurs

Le principe en est très simple : le papa ou la maman skie constamment - ou presque - avec l'enfant et le " tire " à une vitesse de plus en plus grande, sur des trajectoires de plus en plus variées, et sur les pentes les mieux adaptées aux évolutions qu'ils proposent à l'enfant. Il faut bien sur tenir compte de ses capacités et de garder en tête l'objectif numéro un : ne pas tomber dans l'hyper recul en appui sur l'arrière de la tige des chaussures, jambes raidies !
Cette erreur se caractérise de la manière suivante :
- Les tybias sont appuyés contre l'arrière des tiges des chaussures (axe en arrière de la verticale jusqu'a 15° et plus.
- Les jambes sont raides et peu fléchies, les fesses en arrière et le buste un peu cassé pour rattraper le déséquilibre.
- La silouhette est semblable en shuss, en virages chasse-neige, en stem, en virages parallèles et en godilles, aussi bien en trace large que serrée.
Si cet écueil n'est pas évité, mieux vaut alors avoir recours à une pédagogie plus analytique, plus traditionnelle, qui n'est pas l'objet de cet exposé.

Un exemple parmi d'autres
Les résultats obtenus par ce moyen peuvent surprendre. Je cite le cas de la petite Marie (je t'attends transi !!!), "tirée" par son père, ancien coureur de l'équipe de France universitaire. Elle habite dans une station de sports d'hiver et débute à 18 mois. A 20 mois, elle glisse derrière son père en décrivant de longues courbes skis convergents (ce qui désespère son papa, qui rêve déjà de "parallèle"). A 2 ans 1/2, elle prend le petit téléski et passe sa première " Etoile ". A 3 ans 1/2, elle fréquente les cours d'enfants de l'École et du club des sports locaux, mais progresse essentiellement en skiant derrière son père. Elle passe durant la même saison ses 2eme et 3eme " Etoiles ". A 4 ans 1/2, elle passe le "Cabri" et la "Fléchette". Elle skie parallèle partout, fait aussi bien de longues courbes dérapées sur pente moyenne que des virages bouclés sur pentes assez fortes (plus de 30 %); elle s'offre même le luxe de planter son bâton en début de virage; planté réellement efficace une fois sur trois. Elle "tic-tac", ce qui pour elle signifie godiller. Elle adore les schuss, en "oeuf", jambes relativement souples; elle saute et accepte de tomber sans se sentir déshonorée.

Son cas n'est pas unique et on pourrait trouver encore mieux. Reconnaissons cependant que les réussites moins spectaculaires sont légion !

L'erreur fatale numéro un
Se glorifier d'avoir descendu la " bleue " ou la " rouge ", ou même la " noire " ! "Tirer" son rejeton sur des pentes bien adaptées à ses besoins, c'est bien, mais assez peu gratifiant pour un père ou une mère fiers de leur progéniture. Avoir " descendu l'olympique " avec un gamin de 4 ans, c'est autre chose ! En outre, il est moins ennuyeux de se promener sur toutes les pistes de la station que de se contenter "d'astiquer" les pistes de débutant ou même les "vertes", même si, sur de telles pistes, l'enfant accepte très vite des vitesses dépassant celles que pratique papa ou maman ! Neuf fois sur dix les parents entraînent leurs enfants sur des pistes trop difficiles. Même si ces enfants ne se tirent pas trop mal de l'épreuve, ils prennent des habitudes de freinage qui seront ensuite un handicap pour l'acquisition de la décontraction et de l'aisance qui caractérisent tout bon skieur. Le plus souvent, ils tomberont dans la faute précédemment décrite : l'hyper recul en appui sur l'arrière de la tige des chaussures, jambes raidies !

La seconde erreur, presque aussi grave
La chasse aux " Etoiles " prématurée. Les "Etoiles" ou "Cristaux" sont des distinctions données par les Ecoles de ski aux enfants satisfaisant à des épreuves-tests bien précises. Ces épreuves, déjà critiquables dans leur définition, le sont en général encore plus par l'interprétation qu'en font sur le terrain certains moniteurs. Ces tests mesurent beaucoup plus la capacité des enfants à se freiner et à évoluer à vitesse très réduite que leur capacité à effectuer des évolutions glissées à une certaine vitesse. Et cependant vous n'y échapperez probablement pas : votre enfant voudra son "Flocon" puis ses "Etoiles" ! Solution : ne vous pressez pas, jouez sur l'acquisition d'une certaine aisance aidée par une certaine vitesse pour amener votre enfant au-dessus de la valeur "Etoile", et alors il passera les tests "haut la main" sans ressembler à ces pauvres enfants désespérément accrochés à la neige !

Le climat psychologique à créer

Il peut être différent suivant les enfants, mais en règle générale :
- Le ski doit dans tous les cas rester un jeu : éviter les critiques et féliciter beaucoup. Entretenir le rire !
- L'enfant doit avoir une confiance totale dans papa ou maman, et savoir que tout ce qu'on lui demande est possible et sans danger.
- L'enfant doit toujours être volontaire. C'est lui qui décide, en pratiquant, des pistes à utiliser, des évolutions à réaliser, et même de la durée des séances (une demi-heure... ou trois heures).
- Ne jamais oublier qu'un enfant qui skie avec souplesse est réellement infatigable.
- L'émulation peut être utilisée, mais avec modération.
- Les éclats de voix ne sont à utiliser avec grande modération. On peut élever la voix par pédagogie (dans le but d'expliquer avec force), mais jamais sous l'effet de la colère, en particulier avec ses propres enfants.


Enfants jusqu'à 5 ans
- Le ski est - et doit rester - un jeu qui se pratique avec papa ou maman.
- Il peut débuter par des marches en tous sens sur la moquette avec des skis très très courts (dix fois plus facile que sur neige pour une même accoutumance aux engins, glissades exclues).
- Ensuite, seulement, marches sur la neige, sur terrain plat et neige douce.
- Sur le dos de papa ou maman, avant même de chausser les skis, découverte de la piste et des évolutions sur pistes, en particulier évolutions d'autres enfants, si possible du même âge.
- Entre les jambes de papa, glissades en s'appuyant contre un bâton de ski tenu devant les genoux de papa. En principe, il doit y avoir appui des mains de l'enfant contre le bâton du fait du glissement, et non traction par le bâton. Pour cela, le papa doit se freiner légèrement sans trop donner l'image du chasse-neige.
- Idem avec de longs virages et de longues godilles.
- Puis évolutions semblables à celles des enfants de 6 ans et plus.


Enfants de 6 ans et plus
- Marches et pas tournants avec skis sur la neige.
- Montées en canard ou en escalier puis schuss faciles avec arrêt automatique sur le plat.
- Puis ski sur les talons de papa ou de maman, qui doivent contrôler leur vitesse pour ne pas distancer l'enfant, mais qui ne doivent pas l'obliger à freiner.
- Initiation aussi précoce que possible aux téléskis pour enfants. Préférer les engins téléportés aux téléskis si ceux-ci soulèvent l'enfant. Sinon pour débuter, faire tenir la perche (ou plutôt la sellette) à la main. L'équilibre est facilité ainsi que le lâcher en haut du téléski.
- Alterner le ski sur les talons du papa ou de la maman avec le ski à coté de lui, puis devant lui.
- Le plus tôt possible, rechercher un effet manège sur petit téléski (l'enfant monte et descend sans arrêt, et vous l'encouragez du bas ou du haut de la piste). L'enfant doit s'être préalablement habitué à une certaine vitesse, et aux évolutions que vous lui avez fait faire, en skiant sur vos talons.
- Evoluez peu à peu dans votre choix du terrain et de votre trajectoire lorsque vous "tirez" l'enfant :
- en augmentant la vitesse
- en refermant un peu le rayon des courbes (éviter cependant de trop revenir en travers de la pente)
- en accélérant un peu la cadence d'enchaînement des virages pour arriver à une "presque godille"
- en acceptant de temps en temps des pentes un peu plus fortes, lorsque la neige très douce met en confiance et à condition que ces pentes n'amènent aucun raidissement de l'enfant - en choisissant des reliefs de pistes favorables à vos évolutions (petites bosses - légères ruptures de pente ...)
- vous pouvez aussi utiliser des "jalonnettes" (petits drapeaux), ou des bâtons de ski plantés pour définir des trajets à parcourir. L'enfant fait ensuite ces parcours tout seul ou devant vous.
- Possibilité d'aborder déjà des neiges moins damées, voire demi profondes. Attention ! dans le cas d'un enfant, surtout très jeune (3 à 6 ou 7 ans), qui n'a absolument pas conscience du danger, l'adulte qui l'accompagne doit tout prévoir et doit toujours être prêt à intervenir, ce qui n'est parfois pas facile...
- Possibilité d'alterner le travail avec papa ou maman
- avec des séances à l'école de ski ou au club des sports
- avec des séances de ski avec un ou plusieurs autres enfants
- mais conserver le fil directeur : ski avec papa et maman.
- A tout instant, l'enfant risque cependant de tomber dans la faute classique d'hyper recul en appui contre l'arrière de la tige des chaussures. Si la faute n'a pu être évitée, il faut alors mettre en place une stratégie de correction avant d'aller plus loin.


Le piège tendu aux utilisateurs de cette méthode

La vanité de papa ou de maman, flattés par la réussite de l'enfant, les amène peu à peu à trop exiger de lui et, à l'extrême, à en faire un jeune prodige malheureux qui risque de se dégoûter du ski. Les premiers symptômes du mal sont :
- Des critiques trop acerbes quand une faute technique est commise
- Des comparaisons avec d'autres enfants qui réussissent mieux, en général, ou sur un point particulier. Tel excellent petit ami peut devenir la " bête noire " de votre enfant.
- Une importance exagérée donnée aux résultats de tests ou de petites compétitions d'enfants; même sans parole, la déception d'un père ou d'une mère est perçue par l'enfant et peut avoir, des conséquences graves.
- Pour l'enfant, un gros danger peut aussi être l'adoption d'une technique d'adulte qui sera peut-être périmée lorsque lui-même sera adulte. Pour l'instant : une trace serrée, trop de prises d'appui sur les carres, une maîtrise trop grande des skis susceptible de nuire à un ski de " sensations " et à un glissement maximum skis à plat.


(Pour ce texte je me suis inspiré d'un livre assez ancien sur la pratique du Ski)